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forme d’actions un certain capital et ensuite recouraient soit aux institutions de crédit foncier, soit aux banques proprement dites, pour acheter des terrains et faire construire. Elles comptaient revendre les constructions élevées par elles à un prix plus élevé que le montant des emprunts et en attendant en percevoir un loyer supérieur aux annuités payées aux banques.

Théoriquement, le calcul était juste ; mais il ne tenait pas assez compte des prélèvements faits en pareil cas par les lanceurs de l’affaire, des impôts énormes perçus, au moins en France et en Italie, sur les transactions immobilières, enfin des non-locations qui se produisent inévitablement, quand on dépasse les besoins d’habitation ou qu’on relève trop le prix des loyers. C’est ce qui s’est passé dans toutes ces villes.

A certains moments, à Paris, en 1880, à Rome et à Turin, en 1888, les grands spéculateurs ont profité de l’abondance des capitaux et des dispositions favorables du public pour créer des sociétés immobilières de cette sorte et construire des quartiers entiers, en recourant au crédit sous toutes ses formes. Les terrains haussent de valeur pendant la période de construction, parce qu’une foule de gens achètent à crédit dans l’espérance de revendre avec bénéfice. Mais, au moment où il faudrait trouver des acheteurs ou des locataires, la crise éclate et la valeur des terrains réactionne en raison même de l’exagération de la hausse.

C’est ce qui a eu lieu à Paris en 1884 ; il a fallu près de quatre ans pour liquider la crise immobilière.

En Italie, en janvier 1889, une crise du même genre a éclaté à Turin, à Naples, à Rome. Le gouvernement, qui favorisait ces spéculations dans un but politique, avait forcé les banques d’émission, et particulièrement la Banca Romana et Il Banco di Napoli, à faire aux constructeurs de quartiers nouveaux des avances très exagérées et il a fallu revenir en fait au cours forcé des billets de banque et en augmenter l’émission. Au moment où nous écrivons (1892), Rome ne s’est pas relevée encore des catastrophes qui ont frappé ses