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loyers qu’elle encaisse et les annuités qu’elle paye au Crédit foncier. Son intérêt est donc d’accroître sa dette pour augmenter son domaine.

Au 31 décembre dernier, ses emprunts s’élevaient à 75.545.602 francs 22 garantis par des immeubles dont la valeur, d’après l’estimation admise par le Crédit foncier, n’était que de 101.800.000 fr. Mais nous sommes obligés de discuter ce chiffre. Le prix de revient, d’après le bilan de la Rente foncière, n’est que de 92.933.235 fr. 85 ; la valeur locative ne dépasse pas 3.900.000 fr., ce qui, au taux de 5 p. 100, généralement admis pour les maisons, donnerait un capital de 78 millions. Quoi qu’il en soit, en admettant même le chiffre de 101 millions, les prêts du Crédit foncier atteindraient 73 p. 100 de la valeur du gage et dépasseraient la limite de moitié fixée par les statuts. Mais ce sont surtout les traités passés avec cette société qui donnent lieu à observations.

Par la convention du 20 septembre 1879, le Crédit foncier promet de prêter à la Rente foncière jusqu’à concurrence de 218.600.000 francs. Ce fait ne s’est pas réalisé ; mais il y a une certaine imprudence à s’engager pour une somme de cette importance avec une seule société. D’une façon générale, d’ailleurs, on comprend mal les avantages de semblables traités, au moins en ce qui concerne le Crédit foncier.

Par le traité du 11 février 1885, le Crédit foncier consent à consolider trois semestres d’annuités s’élevant à près de 4 millions, qui lui sont dus par la Rente foncière. Je n’ai pas besoin d’insister sur la gravité d’une pareille stipulation, dont les conséquences sont évidentes. En même temps, le taux des prêts est réduit provisoirement et les intérêts différés sont portés à un compte spécial. Une provision a été, il est vrai, constituée pour couvrir le risque de cette opération incorrecte à divers points de vue.

Je n’insisterai pas sur la convention du 20 janvier 1886, dont l’étude faite en détail par un de mes collaborateurs conduit à ce résultat que l’ensemble des prêts faits par le Crédit foncier à la Rente foncière a été porté à 107.500.000 fr., tandis que l’ensemble du gage ne peut être évalué actuellement à plus de 136 millions. Mais je dois signaler une particularité tout à fait digne d’attention.

Le 16 novembre 1880, le service de l’examen des titres signale un vice de forme qui pouvait infirmer les hypothèques prises sur les immeubles de la Rente foncière. On passa outre. Le 27 janvier 1887, le service ayant renouvelé d’une manière très pressante ses réclamations et les ayant appuyées sur deux arrêts de cassation de 1881 et de 1885, qui confirmaient l’un et l’autre la jurisprudence antérieure, la situation fut enfin régularisée. Les engagements, dont