Page:Jannet - Le capital, la spéculation et la finance au XIXe siècle, 1892.djvu/148

Cette page n’a pas encore été corrigée

l’avenir de cette région est dans un mélange de culture et d’élevage parqué, qui comporte une grande réduction des exploitations, et surtout dans l’utilisation des cours d’eau par l’irrigation. Or ces travaux sont fort coûteux, et là encore la petite culture avec le temps pourra seule les rémunérer. C’est à elle que le dernier mot finira par rester aux États-Unis[1].

V. — Précisément en ce moment la République américaine nous montre combien les phénomènes de rente sont transitoires et quelles vicissitudes inattendues viennent atteindre la propriété foncière. Les campagnes de la Nouvelle-Angleterre et même d’une partie des États de New-York et de Pensylvanie sont en proie à une crise agricole bien plus intense que celle de l’Europe occidentale. Des districts entiers se dépeuplent ; partout ce sont des fermes à vendre pour un prix qui ne représente même pas la valeur des constructions et des clôtures, en sorte que la terre est donnée pour rien et elles ne trouvent pas d’acquéreur ! Dans le Vermont, qui est très montagneux, il est vrai, 30.000 acres de terre sont en vente à moins de 5 dollars l’acre (80 fr. l’hec­tare) ; dans le New-Hampshire, 20.000 acres sont en vente en moyenne à 10 dollars 86 l’acre (135 fr. l’hectare). Dans le New-York, on peut maintenant acheter de très bonnes terres à raison de 30 dollars l’acre (375 fr. l’hectare). C’est une baisse de près de 50 pour 100, comparativement à il y a quinze ans. Dans toute la partie des États-Unis comprise entre l’Atlantique et les Alleghanies jusqu’au Maryland, la terre a perdu au moins un quart de sa valeur.

Cette situation est discutée dans toute la presse américaine. Les causes en sont multiples ; mais elles peuvent se ramener à cinq :

Avant tout la concurrence des pays neufs, comme nous disons en France, c’est-à-dire de l’Ouest, non seulement des anciens États de la vallée de l’Ohio et du Mississipi, mais des nouveaux États,

  1. Sur les conditions agricoles de l’Ouest des États-Unis, V. notre Monographie d’un farmer de l’Ouest du Texas, dans la collection des Ouvriers des deux mondes, un fascicule in-8° (Paris, Didot, 1892).