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1879, a donné à la propriété non bâtie une évaluation qui aurait constitué sur celle de 1851 un accroissement de 43,50 p. 100[1]. Cette évaluation inspirée par un but fiscal a été contestée et doit être évidemment réduite ; mais une augmentation sensible entre 1851 et 1879 (1.275 francs l’hectare à la première date, 1.700 francs à la seconde), s’explique très bien par la baisse du pouvoir de l’argent et par les énormes incorporations de capitaux qui ont été faites dans notre sol pendant cette période.

Partout où la chaux a pu être transportée à bon marché, dit M. Risler dans la Géologie agricole, la valeur du sol a augmenté d’un tiers de 1850 à 1870. C’est dire combien inégalement les différentes parties du territoire ont bénéficié des progrès modernes. C’est dire surtout pour combien l’incorporation de nouveaux capitaux est dans la plus-value foncière. Le même fait s’est produit en Angleterre : c’est grâce à des dépenses considérables que des bas-fonds marécageux ont été changés en riches prairies, tandis que bien des terres légères cultivées au moyen âge ont dû être remises en parcours[2]. Henri George, dans la plupart des exemples qu’il donne des plus-values foncières, méconnaît complètement l’importance de cet élément.

L’accroissement de la population et l’augmentation de la consommation des produits animaux par les centres manufacturiers ont sans doute été pour une part dans cette plus-value de la valeur des terres ; mais cette cause a été neutralisée d’abord en partie par la hausse de la main-d’œuvre agricole, nous l’avons dit ; puis d’une manière radicale par la concurrence des pays nouveaux, qui, à partir de 1875, a ramené le prix de tous les produits du sol fort en arrière et, par conséquent,

  1. En 1851, l’Administration avait évalué le revenu net des 49 325 514 hectares imposables à 1.905.722.436 francs, ce qui, à un taux de capitalisation de 2,99 p. 100, donnait une valeur vénale de 63.696.466.000 fr. En 1879, 50.053.259 hectares imposables auraient donné un revenu net de 2.645.505.565 francs ce qui, au taux de capitalisation de 2,89 p. 100, ferait une valeur vénale de 91 milliards 593.966.075 francs.
  2. V. James Caird, the Landed interest, 1881, et un mémoire de M. H.-H Smith, Landed incomes, lu au Surveyor’s institute de Londres, en janvier 1890.