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abondantes sans qu’on pût encore recourir à des importations étrangères[1].

Mais si la théorie de Ricardo doit conserver sa place dans le catalogue des lois économiques comme une tendance qui peut se réaliser dans certaines circonstances, sa réalisation effective est très rare ; elle est en effet contrebalancée par deux autres lois bien plus énergiques : la dépréciation des capitaux anciennement engagés et la baisse du taux de l’intérêt, en sorte que dans la plupart des cas la valeur vénale des terres et des maisons ne représente pas et de beaucoup la somme des capitaux qui y ont été incorporés. Les faits européens et américains que nous allons exposer le prouveront. Puis, là même où la rente existe, l’action des causes qui, dans une société libre et prospère, tendent à relever le prix des services et font profiter l’ouvrier de la productivité de l’industrie, fait que la hausse des salaires absorbe en grande partie le bénéfice des propriétaires. C’est ce qui s’est passé en ce siècle en France, notamment pour l’agriculture, dans la période de plus-value de la propriété foncière de 1815 à 1870.

De ces grands débats théoriques il reste seulement ceci : c’est que, dans certains cas, de notables plus-values sont réalisées par des propriétaires heureux et que d’autres fois un changement, un progrès, dans les arts industriels les ruine, témoins ces terres du Vaucluse et de la Drôme, qu’enrichissait la culture de la garance et auxquelles la découverte des couleurs dérivées de la houille a fait perdre une grande partie de leur valeur. Cela montre une fois de plus l’influence dans les choses humaines de la chance ou, pour parler.

    xiie siècle, et à 1691, au xiiie siècle. La valeur de la terre était donc 16 fois plus grande alors qu’au début.

    Le Play, avec sa merveilleuse intuition historique, avait aperçu dans le fait que plus les contrats relatifs à la culture du sol sont anciens plus le prélèvement des travailleurs agricoles est considérable, la preuve de la surabondance des terres et constaté que la densité croissante de la population avait toujours donné aux propriétaires du sol le moyen d’en tirer un meilleur parti. (La Réforme sociale en France, introduction, chap.vi, § 4, note.)

  1. Prolégomènes historiques, dans les Notices et extraits des manuscrits de la Bibliothèque Nationale, t. XX, pp. 285, 286.