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pour obéir aux passions protectionnistes dépassent de beaucoup les dépenses publiques, en sorte qu’un surplus considérable d’espèces monétaires est accumulé dans les caisses du Trésor. Plus la dette publique diminue, plus cette concentration des espèces métalliques s’accentue. En outre, le système des banques nationales a eu pour résultat de réduire à des proportions insuffisantes l’émission des billets et de lui enlever toute élasticité. La conséquence en est une raréfaction automatique des espèces monétaires, et, quand les mouvements du commerce extérieur et de la Bourse agissent dans le même sens, une crise éclate. Le Secrétaire du Trésor, sur l’avis des Banques associées de New-York, vient alors au secours du marché en remboursant par anticipation, quand la loi l’y autorise, au besoin en rachetant à la Bourse des titres de la dette publique à un cours maximum qu’il détermine. Depuis 1881, cette intervention s’est produite au moins une dizaine de fois. Elle établit entre la Finance et le Trésor des solidarités dangereuses pour la moralité publique. C’est toujours au secrétaire du Trésor que le marché de New-York s’adresse, pour qu’il lui apporte du secours soit en rachetant à la Bourse des fonds de la dette non venus à échéance, soit en déposant une partie de ses fonds disponibles dans les banques nationales[1].

Les sommes considérables que le gouvernement russe et la Banque de Russie ont à leur crédit à l’étranger, à Londres, à Berlin, à Paris, à Amsterdam, pour faire face au service des emprunts et pour empêcher le cours du rouble de trop baisser, sont aujourd’hui un des facteurs les plus importants des oscillations du marché financier. Ces sommes varient entre 500 et 600 millions de francs[2], dont un tiers se trouve à Berlin. Elles doivent être toujours liquides et disponibles ; elles sont employées en reports et suivant que le ministre des

  1. V. entre autres the North American Review, janvier 1888, et the Economist, 9 août et 7 décembre 1890.
  2. 580 millions de francs à la fin de 1891, d’après M. Raffalovich, Journal des Economistes de janvier 1892.