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l’aveugle.

qu’il soit vieux ou jeune, à quoi me serviraient mes yeux ?

— Au moins lui dis-je, pense à toi ; pense donc qu’un jour, si tu es aveugle, tu sentiras dans ton âme le besoin d’aimer et de choisir une compagne et de la voir ! Et comment pourras-tu la voir si tu ne la vois pas à présent ? comment referas-tu son visage si tu ne la vois pas d’avance ? Viens donc, mon Jules ; allons au bal ce soir. Tu y verras la foule de jeunes filles sans époux que leurs mères traînent après elles au bruit de l’orchestre de Tolbecque ou de Colinet, espérant pour leurs filles un mari qui ne vient pas. Viens au bal ce soir, afin que tu puisses choisir et jeter ton mouchoir à la plus belle quand tu n’auras plus tes yeux !

— Ne me parle pas du bal ! reprit-il vivement : le bal est le plus horrible plaisir que je connaisse ; le bal est une prostitution anticipée, dont la fausse nudité est mille fois plus indécente que la véritable nudité. Ne me parle