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DE SADE.

il leur distribuait les rôles de sa comédie. Bientôt tous les rôles étaient appris, et, devant une brillante société de galériens et de grandes dames venues de Paris, on jouait la comédie du marquis de Sade. Tous ces pauvres fous jouaient leurs rôles à merveille, le marquis remplissait le sien de son mieux ; la fête se terminait ordinairement par des couplets qu’il venait chanter lui-même en l’honneur des dames et du directeur de la prison, le ci-devant abbé Goulmier, qui était devenu le protecteur, et, disons-le, l’ami du marquis de Sade. Tant pis pour l’abbé Goulmier[1] !

J’avoue que pour un homme quelque peu observateur ce devait être là un singulier spectacle, une comédie de l’auteur de tant d’actions infâmes jouée par des fous dans la cour de Bicêtre, et le marquis de Sade rece-

  1. Une de ces comédies, s’il m’en souvient, se terminait par ces deux vers :

    Tous les hommes sont fous ; il faut, pour n’en point voir,
    S’enfermer dans sa chambre et briser son miroir.