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INTRODUCTION.

battre tous ces obstacles ! Que de fois, en me promenant lentement dans les galeries de bois du Palais-Royal, ce temple de la librairie et de la prostitution publique, ruinées toutes les deux, ai-je senti mon cœur bondir d’indignation dans ma poitrine quand je voyais ces somptueuses boutiques remplies tout entières par une littérature dont ni moi ni personne nous ne pouvions lire quatre pages de suite ! Dans ce temps-là le Palais-Royal n’était permis qu’aux adeptes : Alfred de Vigny, qui commençait avec toutes sortes de peines, était obscurément annoncé chez les libraires du quai de la Vallée ; M. de Balzac, cet homme de tant d’esprit, publiait, et en vain, depuis dix ans un roman nouveau tous les huit jours, rêvant tristement une célébrité qu’il n’a pu réaliser que six ans plus tard. Que de tourments dans ces jeunes âmes ! mais ils se traînaient péniblement autour du mur d’airain sans l’entamer. Alors, pour vivre, il n’y avait qu’un moyen pour les pauvres poëtes : vivre pauvre et inconnu, ou bien