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INTRODUCTION

restez à votre place, homme heureux pour qui la toile tombe et se relève toujours à propos : la coulisse change tout cela.

Dans la coulisse en effet l’art, quel qu’il soit, poëte, musicien, peintre, comédien, l’art est hideux : le poëte, plein d’envie, à l’œil fauve, aux cheveux rares, homme flatté du matin au soir par les plus insipides flatteurs, esprit désenchanté, triste égoïste qui ne pense qu’à faire un peu plus de bruit qu’un autre dans le monde des idées, s’agite de long en large et rature ses vers ; le musicien, d’une main souvent avinée, sans passion, sans enthousiasme, sans croyance, frappe au hasard des pieds et des mains, non pas de l’âme, un malheureux piano qui produit bien des grincements plaintifs avant de fredonner le flonflon si cher à la foule ; le peintre va chercher au coin de la borne quelques pauvres filles, qu’il déshabille pour en faire des déesses de la fable ou des saintes de la légende ; la comédienne, si belle tout à l’heure, teint son visage et ses