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trouver l’histoire dans les poëmes, dans les chroniques, dans les légendes, dans les souvenirs d’un peuple, et même dans ses chansons. Ce poëme d’Ermoldle Noir est tout une découverte, et des plus importantes ; il complète, à la façon d’une épopée barbare, les récits héroïques des expéditions des Francs en Bretagne, et, ceci dit, il n’est pas nécessaire que nous relevions les calomnies du clerc gallo-franc, qui, dans son dévouement aux intérêts du César germanique, ne craint pas d’accuser cette terre de Bretagne de vol, d’inceste et de rapines. Toute haine à part, cet Ermold le Noir mérite véritablement l’honneur que notre historien vient de lui faire. Il a parcouru la terre de Bretagne ; il a franchi les rochers, il a battu les broussailles, il a entendu la mer grondante. — Quittons le poëme, pour revenir aux annales écrites en prose : Morvan, mort comme un soldat et comme un roi, est remplacé par Wiomarc’h ; ce Wiomarc’h n’est autre, selon toute apparence, que le fils de Morvan ; à coup sûr : il est l’héritier de son courage. À peine roi, Wiomarc’h ravage les frontières des Francs, et il faut que le comte Guy se porte de nouveau sur la Bretagne. Bientôt le comte Guy ne suffit pas, trois armées conduites par trois chefs ; par l’empereur et ses deux fils en personne, viennent pour combattre ce petit peuple, et encore fallut-il quarante jours pour venir à bout de ces Bretons de Morvan et de Wiomarc’h. — À la fin, il fallut se soumettre. — Au plaid d’Aix-la-Chapelle, en 828, le héros de la Bretagne, accompagné des princes et des machtierns de la Domnonée, va se présenter à l’empereur, qui accepte ses hommages. Mais le Breton n’était pas dompté ; il voulait que sa terre fût libre ; il fallut tuer Wiomarc’h pour venir à bout de cette révolte. Privés de leur chef, les Bretons demandent la paix et jurent de nouveau fidélité à l’empereur. Louis le Débonnaire se hâte de pardonner, tant il était las de ces victoires ! — Sous Le règne du Débonnaire, un jeune Breton, fils des rois du pays, Nominoé, avait été fait gouverneur de Bretagne. Ce jeune homme, digne de remplacer Morvan, Wiomarc’h et Waroch, avait autant de patience que de courage. Il attendit l’heure de la délivrance, car il savait que cette heure sonne toujours pour les peuples qui lui prêtent un cœur vaillant et une oreille attentive. — Mais avant que la Bretagne ne soit libre, il faut attendre bien des révolutions dans le palais de l’empereur et dans les destinées de l’empire. Il faut d’abord que Louis le Débonnaire perde la reine Hermengarde, tendrement aimée ; il faut que la nouvelle impératrice, Judith, dans tout l’éclat et dans toute la fleur de la plus dangereuse beauté, mette au monde un enfant, Karl ;