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est arrivée aux conclusions de Jules César, aux jugements de Tacite. Un savant du premier ordre, que nous ne pouvons trop citer dans les premières années de cette histoire, a retrouvé, avec la patience de la science nouvelle, les preuves qui manquaient à l’histoire écrite par Tacite et par Jules César. Voici ces preuves :

1o Le géographe Ptolémée nous apprend qu’il y avait des Alrébates, des Parisiens et des Belges parmi les émigrés gaulois établis dans la Grande-Bretagne[1]. Beaucoup d’autres tribus, émigrées de la Gaule, avaient conservé dans l’île les noms des cités d’où elles étaient sorties, par exemple, les Morini, les Œdui, les Rhemi, les Cenomani, les Menapii (Irlande, etc.).

2o La peuplade des Britanni elle-même, qui donna son nom à l’île tout entière, avait habité antérieurement les côtes actuelles de la Flandre et de la Picardie, s’il en faut croire le témoignage de Pline et de Denys le Périégète[2].

3o Enfin les triades historiques du pays de Galles (d’accord en ceci avec les assertions des deux grands historiens) rapportent que les Brythons qui vinrent s’établir dans l’île de Bretagne sortaient de cette partie de la Gaule qui est située entre la Seine et la Loire. Véritablement, et à partir des temps les plus reculés, nous trouvons des Veneti établis sur le continent, dans la péninsule gauloise, et au delà des mers, aux extrémités de la Grande-Bretagne. Or, comme ces peuples étaient les rois des mers qui baignaient leurs rivages, on comprend que les habitants de la péninsule armoricaine et ceux de la côte opposée devaient en quelque sorte ne former qu’un seul et même peuple.

Dans les premiers temps de l’invasion des Gaules, César avait compris que cette confraternité presque invincible des peuples de la Bretagne et de la Gaule armoricaine lui imposait l’obligation de soumettre les insulaires à ses armées. Ainsi fit-il. Nous avons vu plus haut quel avait été le résultat des deux campagnes mémorables de cet habile capitaine contre les intrépides Bretons. Auguste, Tibère, Caligula, laissèrent en paix les peuples domptés par César. L’empereur Claude, poussé par Bérié, prince exilé de la Bretagne, entreprit la conquête de cette île, que César, suivant la vive expression de Tacite, n’avait fait qu’indiquer à ses successeurs[3]. Aulus Plautius, avec quatre légions, traversa le détroit et battit les Bretons. Ostorius Scapula, successeur de Plautius, eut à défendre contre les insulaires toutes les conquêtes accomplies.

  1. Ptolém. géog. l. II, ch. iii.
  2. Plin. Hist. nat. IV, ch. xxx ; — Dionys. Perieg. v. 280 et seq.
  3. Tacit. Agric. XIII.