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et tôt où tard elle devait porter ses fruits. Civilis et Vindex avaient laissé après eux leur exemple et leur souvenir. La Gaule, toujours frémissante sous le joug, ne cessa de protester, par des révoltes continuelles ; en faveur de son indépendance. Réduits à l’inertie pendant plus d’un siècle et demi, les Gaulois se mirent à s’agiter de nouveau en 193, lorsque Claudius Albinus traversa le détroit avec les légions bretonnes pour venir combattre son rival.

Sous le règne ou plutôt sous le joug de Caracalla, de Macrin et d’Héliogabale, les Gaulois attendent en silence l’heure de l’action ; ils abandonnent l’empire à tous les troubles qui l’agitent ; plus tard seulement nous voyons cet empereur malheureux, vertu qui ne sait pas se défendre, Alexandre Sévère, tomber sous les coups des légions du Rhin ; dans ces légions violentes les soldats gaulois se faisaient remarquer par leur humeur intraitable et leur indiscipline. Verum gallicanæ mentes, ut sese habent, duræ et sæpe imperatoribus graves severitatem hominis nimiam… non tulerunt, dit Lampride dans sa Vie d’Alexandre Sévère.

Le règne de Gallien fut pour l’empire romain une suite non interrompue de calamités de tous genres ; en revanche, il fournit à la Gaule une occasion de réaliser ses rêves d’indépendance. Les tyrans, ainsi Rome les appelait, se montrèrent de toutes parts, et plusieurs de ces chefs nationaux, que les historiens à gages couvraient de tant d’insultes, furent de brillants modèles de vertus et de courage. Posthume, entre tous ces princes, sut mériter l’amour et l’admiration de ses sujets. Maître de toutes les Gaules durant sept années, il en chassa les Germains, il fit même construire des forteresses au delà du Rhin, et mérita le glorieux surnom de restaurateur de son pays.

Victorinus, Lollius, Marius et Tetricus, qui remplacèrent tour à tour ce grand homme, s’efforcèrent de soutenir le poids du nouvel empire… la lâcheté et la trahison du dernier de ces princes firent écrouler cette monarchie des Gaules rêvée par le Batave Civilis, fondée par le génie de Posthume, et dont la durée ne put dépasser quatorze ans.

Sous l’empereur Probus, on vit Proculus et Bonose entraîner une partie des Gaulois dans leur révolte. La Gaule, gouvernée comme une province détachée par les princes qu’on plaçait à sa tête sous le titre de César et d’Auguste, formait une sorte d’empire indépendant. Obligée qu’elle était de défendre son Auguste ou son César contre l’ambition de leurs compétiteurs, son énergie s’exalta jusqu’à l’enthou-