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Il était donc impossible d’assiéger les villes de la Bretagne ; ou bien si, en fin de compte, la ville assiégée était serrée de trop près, soudain les Bretons, montés sur leurs légers navires, emportaient, en fuyant, tous les biens et toutes les personnes de la ville assiégée. Ajoutez que les vaisseaux des Bretons étaient construits tout exprès pour obéir aux caprices et aux fureurs de cette mer turbulente ; moins que les navires des Romains ils redoutaient le flux et le reflux et les bas-fonds de l’Océan. La proue, plus haute, résistait davantage aux vagues et aux tempêtes ; le bois de chêne pouvait supporter les chocs les plus rudes : « Les ancres sont retenues par des chaînes de fer au lieu de cordages ; les voiles sont de peaux molles, amincies, bien apprêtées, soit qu’ils manquent de lin ou ne sachent pas l’employer, ou plutôt qu’ils croient impossible de diriger avec nos voiles des vaisseaux aussi pesants à travers les tempêtes et les vents impétueux de l’Océan. Dans l’action, notre seul avantage est de le surpasser en agilité et en vitesse ; du reste, ils sont bien plus en état de lutter contre les mers orageuses et contre la violence des tempêtes : Nos vaisseaux, avec leurs éperons, ne pouvaient entamer des masses aussi solides, et la hauteur de leur construction les mettait à l’abri des traits. Comme aussi craignent-ils moins les écueils. Si le vent vient à vibrer, ils s’y abandonnent avec moins de périls, et ne redoutent ni la tempête, ni les bas-fonds, ni, dans le reflux, les pointes et les rochers : tous ces dangers étaient à craindre pour nous. » Vous le voyez, dans ces premiers chapitres de leur histoire, ces peuples de la Bretagne montrent tout d’abord une grande énergie ; cette idée de se battre contre les Romains de César enflamme leur courage. Quand arrive la flotte romaine, les Bretons se précipitent sur deux cent vingt navires tout prêts au combat, et les Romains les attaquent non par la force, mais par la ruse. Ils coupaient avec de grandes faux les voiles et les agrès des barques bretonnes ; ce n’était plus une bataille navale, c’était un combat corps à corps, sous les yeux mêmes de César, qui, du rivage, encourageait les siens de la voix et du geste. Cette fois encore les Romains furent vainqueurs, mais César souilla lui-même sa victoire sur les Venètes, il fit mourir tout le sénat, et les soldats, qui n’étaient pas sénateurs, il les vendit à l’encan.

Les plus belles pages des Commentaires sont consacrées à raconter ces guerres si vives avec la vaillante Bretagne. César, à force de s’en occuper dans son livre, comme il s’en était occupé les armes à la main,