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d’un vieil orme dont la feuille était encore un bourgeon rougeâtre ; en même temps mon ami déployait lentement un de ces immenses journaux américains dont le nombre et l’étendue sont encore pour la France un vif sujet d’étonnement, et quand enfin il me vit plus calme et tout prêt à écouter, il me lut lentement cette triste et véridique histoire des dernières sensations d’un homme condamné à mort. J’ai su depuis que, pour ne pas me jeter dans trop de douleurs, mon lecteur avait passé sous silence la dernière entrevue du condamné avec Élisabeth Clare, jeune fille que le condamné aimait passionnément :

« Il était quatre heures de l’après-midi lorsqu’Élisabeth me quitta, et quand elle fut partie, il me sembla que j’avais fini tout ce que j’avais à faire dans ce monde. J’aurais pu souhaiter alors de mourir à cette place et à l’heure même, j’avais fait la dernière action de ma vie, et la plus amère de toutes. Mais à mesure que descendait le crépuscule, ma prison devenait plus froide et plus humide, la soirée était sombre et brumeuse ; je n’avais ni feu ni chandelle, quoique ce fût au mois de janvier, ni assez de couvertures pour me réchauffer ; — et mes esprits s’affaiblirent par degrés, — et mon cœur s’affaissa