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Cette étude était douloureuse. Ces murs humides, cette lumière blafarde, cette paille en lambeaux, et sur cette paille une jeune femme que déjà l’échafaud réclamait, sans autre espoir (fragile espoir !) que la cour de Cassation ! comment aurais-je pu conserver ma colère en présence de ce tableau lamentable ? Dans sa prison, aussi bien que dans le monde, cette femme était mon étude, ma tâche et ma douleur de chaque jour. Le matin j’assistais à son petit lever ; le premier rayon de soleil qui tombait d’aplomb sur sa litière la réveillait en sursaut ; ses yeux s’ouvraient précipitamment et effrayés ; puis elle se dressait sur son séant, et restait morne et pensive. Un peu plus tard elle était debout, et, fidèle à de certaines habitudes d’élégance et de propreté, elle mettait toutes choses en ordre dans sa prison et sur sa personne. D’abord elle faisait son lit, c’est-à-dire, elle ramassait çà et là les moindres brins de paille épars dans son cachot ; elle approchait sa cruche de ses lèvres ; l’eau froide tombait sur son pâle visage, ranimé un instant ; elle lavait ses mains déjà si blanches, elle arrangeait sur sa tête si mignonne ses cheveux longs et noirs, regardant lentement son pied, sa main, sa taille élégante ; elle caressait doucement son petit cou si ferme, non sans frissonner de temps à autre, comme si ses mains