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ai eu grand besoin depuis un an ! Malheureuse que je suis, un an de tortures et de prison pour un mois de mariage ! Nous arrivâmes ainsi à la porte de sa maison ; j’arrêtai mon cheval ; la jeune femme était muette, je lui donnai le temps de se remettre. Quant à Henriette, transie de froid, elle avait caché sa tête sous le dernier collet de mon carrick, et elle s’était endormie, les deux mains sur mes genoux.

À la fin, je dis à la jeune dame : — Voulez-vous, Madame, que je vous mène à votre mari ? Elle me jeta un regard languissant, mais plein de reconnaissance. Alors je soulevai la tête d’Henriette, je la relevai avec précaution, et j’abaissai la portière de ma voiture ; l’air frappa sur la tête de la fille endormie, le froid la saisit, elle ouvrit les yeux, elle prononça comme une plainte vague et sans suite. La jeune femme honnête était déjà sur le seuil de la porte ; sans rien dire, elle ôta le châle noir qui couvrait ses épaules, et, remontant sur le marchepied du cabriolet, elle entoura de ce sympathique lambeau les épaules d’Henriette, qui luttait encore contre le sommeil ; l’impassible Gauthier tenait la bride de mon cheval.

Sa dernière aumône accomplie, la malheureuse reprit courage ; elle montait le raide escalier en s’appuyant