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pas, a été voir Lacenaire dans sa prison, il l’a vu et il lui a parlé tous les jours. Cependant, malgré la solennité de ces conversations quotidiennes, recueillies avec tant de scrupule, elles sont peu remarquables dans le fond et par la forme. C’est toujours le même scélérat qui se fait sceptique et goguenard, et qui devait par la lâcheté de sa mort donner un_si horrible démenti aux forfanteries de sa vie. — « La vertu, dit-il, c’est la fortune ; le crime, c’est la misère ; l’autre monde, c’est le néant ; pourquoi ne mangerait-on pas un homme comme un bœuf ; la femme a le tempérament lymphatique ; j’aimerais mieux manger un homme ; je préfère une femme laide à une jolie femme. » — Deux pages plus bas, l’auteur ajoute : « Lacenaire a un grand faible pour l’excellent vin de Bordeaux ; il est fou du Champagne. » La postérité s’en souviendra.

« II est mécontent quand on l’appelle M. Lacenaire. » II dit un jour : « Tuer sans remords est le premier des bonheurs ! » II dit de lui : « Je suis né assassin, comme on naît poëte! » Echafaud lui répugne ; il sourit au mot de guillotine. Il attendait l’effet de son pourvoi, et il disait : « Cette attente commence à m’embêter. » Un jour, il va chez M. Scribe, il demande l’aumône. M. Scribe, généreux comme on ne l’est