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a fois. »

Quand elle passait dans les villes, les plus grands de la cité se pressaient autour d’elle pour entendre parler sa bouche d’or ; à chaque harangue, elle répondait par une parole improvisée, et chacun restait charmé de sa courtoisie. Mais le Louvre était sa vraie patrie, et, dans les premiers jours de son mariage, il n’y avait pas de plus beau spectacle que de voir le jeune roi de Navarre donnant le signal de la fête et dansant la Pavanne d’Espagne, « danse où la belle grâce et majesté sont une belle représentation ; mais les yeux de toute la salle ne se pouvoient saouler, ny assez se ravir par une si agréable veue ; car les passages y estoient si bien dansez, les pas si sagement conduits, et les arrests faits de si belle sorte, qu’on ne sçauroit que plus admirer, ou la belle façon de danser, ou la majesté de s’arrester, représenter maintenant une gayeté, et maintenant un beau et grave desdain : car il n’y a nul qui ne les ait veus en cette danse, que ne die ne l’avoir veue danser jamais si bien, et de si belle grace et majesté qu’à ce roy frère, et qu’à cette reyne sœur ; et quant à moy, je suis de telle opinion, et si l’ay veue danser aux reynes d’Espagne et d’Ecosse. »

Qui parle ainsi ? Brantôme, un homme d’armes ami des grands capitaines. On peut l’en croire, quand il parle des dames de la cour de France ! Il les connaît bien, il les montre à merveille ; il applaudit à leur faveur ; il ne se gêne point pour pleurer sur leurs disgrâces. A côté de Brantôme il y avait, pour célébrer la reine de Navarre, un poète, un grand poète appelé Ronsard, l’ami de Joachim Dubellay. Le grand Ronsard, comme on disait sous le règne de Henri IV ! Et quand Ronsard et Brantôme, éclairés des mêmes beautés, se rencontraient, ils célébraient à l’envi Madame Marguerite :