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de comédies ; il n’eut qu’à se montrer pour qu’ils rentrassent dans l’ombre. Ils étaient les représentants d’une époque oubliée ; il était, lui, l’historien des passions présentes. Si bien que tout de suite il fut, parmi nous, riche et populaire, et l’Europe entière ne jura plus que par son génie.

Un seul amuseur peut se comparer à celui-là ; ils étaient du même âge, ils écrivaient à la même époque, mais ils appartenaient à des nations différentes ; cet autre amuseur des jeunes esprits et des honnêtes gens, il s’appelait sir Walter Scott. En moins de cinq ou six années d’études et de succès de tout genre, il advint que notre poète comique était incontestablement le plus rare et le plus charmant esprit de son époque. Il avait accompli à lui seul toute une révolution dans le grand art de corriger doucement les mœurs d’un grand peuple, et de châtier en riant ses passions et ses vices. A lui seul il avait tout deviné, tout découvert et tout mis en ordre en ce monde si nouveau qui avait été l’Empire et n’était déjà plus la Restauration. Le faubourg Saint-Honoré, la Chaussée d’Antin, les maisons modernes, les soldats licenciés à Waterloo, l’active et galante jeunesse, à demi révoltée et fidèle à demi, qui devait remplir de son talent, de son éloquence et de ses vertus viriles tout un règne où la parole était souveraine, où le talent était roi, voilà bien ce que notre auteur avait pressenti dans sa comédie. Il avait accepté glorieusement toutes nos gloires. Il s’était fait l’interprète éloquent de nos justes rancunes ; plus d’une fois il nous avait consolés de nos défaites si récentes et si cruelles, que le nom seul de ces batailles perdues est encore une douleur nationale.

Son intelligence active et dévouée aux plus légère chagrins de cette nation si troublée allait sans cesse et sans fin de