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la chapelle de Versailles, où s’étaient rendus, par députations, le Parlement, la Chambre des comptes, la Cour des monnaies, la Cour des aides, l’Hôtel de ville, le grand Conseil, l’Université, l’Académie française. Le roi eut un dernier sourire pour les lettres et donna huit cents livres de pension au traducteur d’Homère. On n’est pas fâché de rencontrer enfin ce grand nom d’Homère sous la plume de Louis XIV ; on n’est pas fâché que, le lendemain de ce dernier Te Deum, les comédiens ordinaires aient joué le Mariage forcé.

Tels étaient la règle et l’ordre en toute cette existence royale, où chaque heure avait son emploi, qu’à lire en ces pages écrites par un courtisan de Versailles, on finit par trouver que toutes ces journées se ressemblent. À huit heures du matin, le premier valet de chambre en quartier (il avait couché dans la chambre du roi) éveillait Sa Majesté. La premier médecin et le premier chirurgien entraient dans la chambre ; le roi changeait de chemise.

Au même instant, arrivaient le grand chambellan et le premier gentilhomme, avec les grandes entrées. La capitaine des gardes ouvrait les rideaux du lit et présentait l’eau bénite, et, si quelqu’un de ces seigneurs avait quelque chose à dire au roi, c’était le moment, chacun s’éloignant et le laissant libre. On présentait ensuite à Sa Majesté le livre qui contenait l’office du Saint-Esprit (tous les chevaliers de l’ordre y étaient obligés), et l’office étant dit, l’un des seigneurs donnait au roi sa robe de chambre, pendant que les secondes entrées assistaient à sa toilette. En ce moment, le roi se livrait à son barbier, et prenait, sur un plat d’or, une serviette, mouillée d’un côté, sèche de l’autre, avec quoi il se lavait. Puis, il s’agenouillait à son prie-Dieu, ses aumôniers agenouillés avec lui, tous les autres restant debout.