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aux pieds de son confesseur ! Quelle vie bien remplie ! quelle vieillesse abreuvée de chagrins ! quelle mort ferme et chrétienne !

Dans cet autre appartement, qui a conservé je ne sais quel aspect funèbre malgré les peintures riantes, expira, non pas sans peines et surtout sans remords, le roi Louis XV.

C’est ainsi que, dans ce long voyage à travers les magnificences du vieux palais de Versailles, vous passez du triomphe à la défaite, de la royauté au néant. Ce roi si jeune et si brillant, adoré plus qu’un dieu, le même tout-puissant qui se promenait dans ces jardins magnifiques, au bruit de tant de jets d’eau qui se taisaient toutes les nuits, vous le verrez tout à l’heure étendu sur son lit de mort.

Vanité des vanités ! vanité de la ruine et de la résurrection ! Regardez ! on dit que cette dévastation est l’Œil-de-Bœuf, l’Œil-de-Bœuf, cette antichambre à l’usage des plus humbles courtisans… Quelle solitude après tant de foule, et quel silence après tant de bruits ! Où donc êtes-vous, rois du génie et de l’esprit français, Bossuet, Corneille, La Fontaine, Molière, Fénelon, Despréaux, Racine ? Autant de rêves !

Nous voilà maintenant dans la chapelle, à l’heure où Bourdaloue et Massillon remplissaient ces voûtes dorées de leur voix éloquente. En vain vous chercheriez les orateurs et leur auditoire… Autant de fantômes. Le P. Bourdaloue ne viendra pas ; Massillon ne viendra pas ; le roi n’est plus même dans son cercueil de plomb des caveaux de Saint-Denis ; Mme de Maintenon dort depuis plus d’un siècle du sommeil éternel. Chapelle inutile ! et pourtant la revoilà tout entière. En ces murs silencieux brillent encore vingt-huit statues de pierre ; le maître-autel est de marbre et de bronze, les murs sont chargés de bas-reliefs. La tribune a conservé ses vitraux ; la voûte, à son sommet lumineux, porte encore la composition de Coypel. Ah ! comme un seul homme