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Il parlait encore ; en ce moment parut Louise au bras de son père et, les voyant qui se tenaient par la main, Mlle de Beaulieu comprit toutes les choses qu’ils venaient de se dire. Elle passa tour à tour d’une grande pâleur à l’incarnat de la pivoine, et pour cacher sa rougeur elle se jeta dans les bras de son père. Alors, prenant son courage à deux mains, le colonel Martin, tête nue et debout :

— Mon général, dit-il, avec la permission de sa jeune maîtresse, accordez-moi la main de Mlle Mariette. Elle ne m’a rien dit encore ; c’est la première fois que je lui parle mariage, et cependant je sais qu’elle ne me refusera pas d’unir sa destinée à celle d’un officier de fortune.

On eût pu voir en ce moment, sur le visage du général, un contentement qu’il ne cherchait pas à cacher.

— Qu’il soit fait ainsi que vous le désirez, mon cher camarade. Apprenez que je marie en même temps Mlle de Beaulieu avec son cousin le comte d’Escars, un des plus beaux noms de France, et j’en suis bien heureux.

Le mariage de Mariette et du colonel Martin fut un mariage à la hussarde. On y mit de part et d’autre un grand empressement. L’église et le régiment firent de leur mieux pour cette heureuse cérémonie. On eût dit que le ciel même avait voulu sa part dans ces justes noces. Depuis tantôt trois mois le soleil brûlait la plaine, et la terre, au désespoir, subissait nuit et jour des astres implacables. Les premières gouttes de la pluie, appelée à grand renfort de prières, tombèrent juste au moment où Mariette, au bras du général, touchait le seuil de Saint-Étienne. Alors la fiancée, avec un geste pieux, offrit son voile à la pluie et le consacra, tout mouillé, à la Vierge de la chapelle où fut béni son mariage. Oh ! la charmante offrande ! Il y avait encore à sa couronne de la salutaire rosée, et plus d’un parmi le peuple, aujourd’