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ue j’avais prise de ne me plus engager dans cette sottise ; cela se passe, on n’y pense plus. Deux jours après, je vois entrer un valet de chambre avec une petite maison de Chine toute pleine de rubans, et sortir de cette jolie maison un petit chien tout parfumé, d’une beauté extraordinaire ; des oreilles, des soies, une haleine douce, petit comme une sylphide, blondin comme un blondin. Jamais je ne fus plus étonnée ; je voulus le renvoyer, on ne voulut jamais le reporter. C’est ma petite servante Marie qui s’est mise au service du petit chien ; il couche dans sa maison et dans la chambre de Beaulieu ; il ne mange que du pain ; je ne m’y attache point encore, mais il commence à m’aimer et je crains de succomber. Voilà l’histoire, que je vous prie de ne point demander à Marphise, car je crains les bouderies. Au reste, une propreté extraordinaire ; il s’appelle Fidèle ; c’est un nom que les amants des plus belles princesses ont bien rarement mérité... »

Depuis toute une semaine, le commandant Martin et ses bontés pour Zémire furent le sujet des conversations les plus suivies dans l’hôtel d’Escars. On en parlait tout le jour et tous les jours ; il n’était pas un habitué de la maison, entre deux parties de whist, qui ne fût forcé d’entendre une oraison presque funèbre du chevalier sans peur et sans reproche. La tante et la nièce, et surtout Mariette, se disputaient pour savoir si le commandant était le bien invité à venir chez la marquise. Elle soutenait que oui ; elles disaient que non, et qu’il fallait plus de cérémonie. Il fut enfin décidé qu’une belle lettre serait écrite au commandant Martin par la dame de céans, et que Mariette, qui ne doutait de rien, la porterait à la caserne.

— On te conduira jusque-là, disaient la tante et la nièce.

Au fait, à quatre heures sonnantes, on pouvait les voir qui longeaient, en leur carrosse, le quai d’Orsay, plongé