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allures décidées, Mariette était timide et n’osa pas ; elle finit par appeler :

— Zémire !

Alors Zémire, ouvrant un oeil languissant, et comprenant qu’il fallait traverser de nouveau la grande salle où elle avait été si malheureuse, se rejeta d’instinct dans les bras du capitaine. Elle ne reconnaissait plus Mariette elle-même ; elle se serait fait tuer plutôt que d’aller rejoindre la porte où se tenait la dame au jupon traînant. Ses trois maîtresses s’étonnaient de cette résistance :

— Allons, je vois ce que c’est, reprit le bon commandant en frottant la tête de Zémire ; il faut à mademoiselle un garde du corps.

Puis, sans dire mot et tête nue, il suivit ces dames, qui traversèrent tout le café, et quand elles furent rentrées dans le carrosse, il déposa Zémire sur le giron de la jeune demoiselle.

— Adieu, ma chère petite bête, disait-il, je le laisse entre de belles et bonnes mains.

Puis il rougit d’avoir fait un si long compliment.

Ne vous étonnez pas qu’une humble bestiole ait soulevé tant de sympathies en de si nobles cœurs, et s’il vous fallait un exemple, un témoignage en l’honneur de l’un de ces animaux, qui sont en train de prendre « leurs degrés de naturalisation dans l’espèce humaine », c’est un mot de M. Buffon lui-même, il vous suffirait de lire un admirable passage à la date du 13 novembre 1675 :

« Vous êtes étonnée que j’aie un petit chien ; voici l’aventure : J’appelais, par contenance, une chienne courante d’une madame qui demeure au bout du parc ; Mme de Tarente me dit : « Quoi ! vous savez appeler un chien ? Je veux vous envoyer le plus joli chien du monde. » Je la remerciai et lui dis la résolution q