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l était pour elle une épouvante. Enfin, quand M. le duc du Maine eut bien cherché une récompense à sa garde-malade, il jeta les yeux sur un officier de sa maison, un honnête homme, d’un esprit médiocre et d’une humble fortune ; il avait passé cinquante ans, et toujours vécu de son épée ; une petite ferme à Gonesse, la patrie du bon pain, une maison assez jolie, un troupeau de moutons, un grand amour pour la vie des champs, un esprit paisible, il avait tout ce qui fait le bonhomme, et pas d’autre ambition que d’être enfin le capitaine et maréchal de camp aux gardes suisses d’une compagnie dont il était depuis longtemps le lieutenant.

Et si lasse était Mlle de Launay de tant d’émotions et de révolutions dans cette petite cour, qu’elle accepta volontiers la main de ce brave homme, en se chargeant de demander, pour sa dot, ce brevet de capitaine dont il faisait les fonctions depuis tantôt deux années. Cette fois encore, il fallut s’attaquer à la duchesse du Maine, implorer sa bonne grâce, et lui faire accepter les propositions de ce vieil officier, très sage et très prudent, qui voulait bien se marier, mais à condition qu’au préalable on le bombarderait au grade objet de son envie. A la fin, et comme aussi le duc du Maine l’exigeait, la princesse accepta cette alliance ; elle consentit, et le duc du Maine, ayant obtenu le brevet du baron de Staal, donna à la mariée une belle tabatière, une belle robe et sa main à baiser. M. de Staal, en revanche, offrit au maître de Sceaux un agneau de sa bergerie.

A la fin les voilà mariés et retirés bientôt dans leur maison des environs de Paris. Sous ces modestes ombrages, dans ces prairies dont la limite était bien étroite, à côté de ce mari qui ne savait que raconter les petites guerres qu’il avait faites et les petits événements dont il avait