Page:Janin - Contes, nouvelles et récits, 1885.djvu/123

Cette page n’a pas encore été corrigée

de Launay représentèrent à cette fille des rois le nom de M. Dacier, son illustration, sa fortune et le bien qu’il pouvait faire à sa nouvelle épouse, ajoutant que pareille occasion ne serait pas facile à retrouver, elle n’en fut que plus décidée à ne rien entendre, et le mariage fut rompu.

Cependant M. le duc du Maine, après avoir résisté de toutes ses forces au tyran de sa vie, avait fini par rentrer dans sa maison de Sceaux. Là, il menait une vie austère et retirée, appelant la prière à son aide, et trouvant une grande force à se souvenir des leçons de Mme de Maintenon et des pieux exemples de Louis XIV. Ce prince infortuné, dont l’enfance et la jeunesse s’étaient passées dans une abondance infinie et une prospérité de toute chose voisine des fables, quand il eut passé par toutes ces épreuves d’une humiliation sans cesse et sans fin, se vit frapper d’un mal sans remède et grandissant chaque jour. Une lèpre, horrible à voir, s’étendit peu à peu sur son visage, et bientôt il fut impossible de le contempler sans dégoût. Plus il se sentait frappé, plus il s’enfonçait dans l’ombre et dans la solitude, et, cette fois encore, Mlle de Launay, courageuse entre toutes, se fit la gardienne et la consolatrice de ce malheureux prince. Elle pleurait avec lui, elle priait avec lui ; elle écoutait sa plainte, et parfois elle le ramenait au souvenir de ses beaux jours, quand le palais de Versailles resplendissait de toutes ses grandeurs.

Que vous dirai-je ? Il avait, tout malheureux qu’il était, conservé un cœur tendre et reconnaissant, et quand il se vit voisin de sa dernière heure, il déclara qu’il voulait établir Mlle de Launay avant de mourir. Mais M. Dacier était mort sur l’entrefaite, et M. de Silly, qui parfois semblait regretter sa conduite passée, avait laissé dans le cœur de la délaissée un si cruel souvenir, que son nom seu