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la République lui envoya un de ses prêtres. La Reine n’eut plus qu’à s’agenouiller devant Dieu.

Enfin son jour de délivrance arriva. Dès la veille la victime avait raccommodé de ses mains la robe noire qu’elle voulut porter à l’échafaud. Mais comme, la veille, avec cette robe de veuve elle avait paru belle et majestueuse, ses juges ne voulurent pas qu’elle la reprît pour le jour de son supplice : ce fut donc avec le déshabillé blanc que lui avait envoyé sa sœur Elisabeth qu’elle marcha à la mort. De ses deux coiffes de veuve elle avait refait une seule coiffe, mais sans barbes et sans aucune marque de deuil : elle n’avait plus à porter le deuil de personne. Elle arrangea pour la dernière fois ses beaux cheveux, et elle frémit en voyant tout d’un coup sa tête toute blanche, blanchie en vingt-quatre heures !… Elle compléta cette dernière parure en mettant à ses jambes des bas noirs, et à ses pieds ces mêmes petits souliers qu’elle avait conservés précieusement et qu’elle n’avait point déformés depuis soixante-seize jours qu’ils lui servaient.

Oserai-je vous dire ce que Rosalie raconte ? que la Reine, à demi cachée entre la muraille et son lit de sangle, fut obligée de s’accroupir contre le mur pour changer de vêtements, et que le gendarme qui la gardait se baissa dans la ruelle pour voir la