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de joie du Palais-Royal, qu’il avait placée sur le premier banc pour assister plus à l’aise à l’exécution de la veuve Capet.

Rosalie crut d’abord que ce Labuzière ne voulait pas laisser prendre à la Reine ce bouillon dont la pauvre malheureuse avait si grand besoin : cet homme méditait un plus grand crime ; il voulait fournir à une ignoble créature qui avait envie de bien voir la Reine l’occasion de l’approcher de plus près : voilà pourquoi il arrachait la tasse ébréchée aux mains de Rosalie toute en larmes. La tasse fut confiée à la fille de joie de Scévola Labuzière ; et cette fille, dans son affreuse curiosité de voir la Reine, lui porta ce bouillon, dont elle répandit la moitié en chemin. Chaque goutte de ce bouillon ainsi répandu, c’était une goutte de sang de moins dans les veines de Sa Majesté !

Et voilà certes un digne sujet de tableau pour servir de pendant à l’éponge imbibée de vinaigre et de fiel qu’on porta aux lèvres du Christ sur son Calvaire : la maîtresse de Labuzière donnant à boire à Marie-Antoinette d’Autriche pour la mieux voir !

Le même jour, la reine de France étant condamnée à mort, Labuzière alla souper chez sa maîtresse.

Avant le jour fatal la Reine demanda un prêtre :