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Elle cependant, elle était de plus en plus résignée chaque jour. Elle comprenait, à toutes ces barbaries redoublées, que sa dernière heure approchait enfin : elle n’avait plus d’autre occupation que de prier le Ciel. Un jour qu’elle était à genoux elle aperçut dans un cachot qui était en face du sien une religieuse qui priait avec une ardeur sans égale : cette religieuse priait pour la Reine. — Ces deux captives se comprirent du fond de cet abîme et elles se montrèrent le ciel.

Ces journées si tristes, si sombres et si brûlantes du mois d’août firent place aux journées si tristes, si sombres et si froides du mois de septembre. Tout d’un coup la chaleur nauséabonde du cachot fit place à un froid pluvieux ; l’épais nuage de la Conciergerie tomba lourdement dans cette ruelle étroite, et la captive fut exposée au suintement infect de cette prison remplie d’immondices. La Reine avait si froid qu’elle s’en plaignit ; mais à qui se plaindre ? La jeune Bretonne seule en eut pitié : elle allait échauffer au feu du concierge la camisole de la Reine ; et, comme dans cette nuit profonde on ne permettait à la prisonnière ni flambeau ni d’autre clarté que celle du réverbère de la cour, espèce de lueur funèbre comme on en place sur les tombeaux nouvellement habités, la jeune fille, par pitié pour la Reine,