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bouleversement de ce pauvre homme fut tel qu’il perdit la parole pendant dix-huit mois. Depuis cette époque, quoiqu’il sembla guéri, il resta toujours sujet au même accident : à la moindre émotion, à la moindre fatigue, il perdait de nouveau la parole pendant quinze jours ou pendant deux mois. Il est intéressant de remarquer, en passant, ce caractère de l’hystérie : quand un accident a été une fois déterminé sous une forme particulière et grave, c’est toujours le même accident qui réapparaît à toutes les occasions. Il en est de même dans l’observation suivante, que j’ai recueillie. Un homme qui a actuellement quarante-six ans est malade, en réalité depuis l’âge de vingt ans. À ce moment, il se trouvait dans un jardin, près d’une véranda vitrée : un objet lourd, lancé d’un étage supérieur, tomba sur la véranda, en creva les vitres avec un tapage comparable à un coup de fusil. Notre homme, très effrayé, resta muet pendant deux mois. Depuis vingt-six ans, il n’a jamais guéri complètement; le moindre bruit subit, près de lui, une parole un peu trop forte et le voilà de nouveau muet pendant trente ou cinquante jours : « Si on crie trop fort à mon oreille, je tousse deux ou trois fois et puis plus rien, je ne peux plus faire entendre aucun son ». Dans d’autres observations, le mutisme commence chez des jeunes femmes de vingt ans à la suite d’un incendie, à la suite d’une rupture de fiançailles ou d’une querelle avec les parents. Dans un cas, il s’agit de la vue subite d’un individu déguisé en spectre et l’accident qui a eu lieu quand le malade avait dix-huit ans n’est pas encore guéri à quarante et un ans.

Quelquefois, le trouble émotionnel porte plus particulièrement sur les organes de la parole ou de la respiration, car le mutisme survient après des maladies de la gorge ou de la poitrine. Dans certains cas, il ne faut pas oublier qu’il s’agit d’accidents qui ont