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toujours à la puberté, elles s’aggravent au moment du mariage, à la mort des parents ou des intimes, après tous les changements de carrière ou de position. C’est-à-dire qu’elles se manifestent au moment où l’évolution individuelle et sociale devient le plus difficile.

Enfin on arrive encore à la même notion générale en observant les modifications que les diverses névroses déterminent chez tous les malades quand elles se prolongent longtemps. Ces individus semblent avoir cessé d’évoluer; ils restent perpétuellement au point de leur vie où la maladie les a saisies et les a figés. Les parents répètent sans cesse en parlant de leur fils : « Ce garçon a trente ans, mais, en réalité, nous ne pouvons pas le croire : il a gardé l’attitude, les manières, les idées, le caractère qu’il avait à dix-sept ans quand il commença à être malade, on dirait que moralement il n’a pas grandi ». Les malades eux-mêmes s’étonnent de cet écoulement du temps qui ne les a pas transformés, qui semble n’avoir laissé sur eux aucune impression. L’observation nous a montré d’ailleurs qu’une certaine amnésie continue est un caractère commun de la plupart de ces phénomènes névropathiques. Le grand caractère des névroses c’est que l’esprit ou, si l’on veut, la partie supérieure des diverses fonctions n’évolue pas ou évolue mal. Si on veut bien entendre par ce mot « évolution » ce fait qu’un être vivant se transforme continuellement pour s’adapter à des circonstances nouvelles, qu’il est sans cesse en voie de développement et de perfectionnement, les névroses sont des troubles ou des arrêts dans l’évolution des fonctions.

Cette conception des névroses, qui semble vague, parce que le groupe lui-même des névroses, en général, a des limites fort vagues, me paraît avoir au moins autant de valeur que les définitions précédentes,