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La première partie du XIXe siècle ne me semble pas avoir beaucoup amélioré la situation. Pinel, qui prétend avoir considérablement réduit le groupe des névroses, énumère encore sous ce nom, dans sa nosographie philosophique de 1807, une foule d’états dont certains ne sont même pas de nature nerveuse et dont la plupart sont descendus aujourd’hui au rang de symptômes de telle ou telle maladie organique. En 1819, dans son article « névrose » du Dictionnaire des science médicales, il énumère parmi les névroses la surdité, la diplopie, l’amau-rose, la paralysie, le pyrosis, le vomissement, la colique, l’iléus, l’hydrophobie, l’hystérie, l’hypocondrie, le tétanos, etc. Vraiment, on peut se demander ce qu’il trouve de commun à tout cela. je crois qu’on peut toujours faire la même remarque, Pinel n’aurait jamais songé à qualifier de névropathique la cécité d’un homme dont l’œil était crevé parce qu’il voyait la destruction de l’œil; mais il appelle névropathique l’amaurose du tabétique parce qu’il n’avait pas vu l’atrophie de la pupille. Quoiqu’il ne le dise pas nettement et que peut-être il ne s’en rende pas compte, c’est toujours le même caractère d’extraordinaire et d’incompréhensible qui réunit tous ces phénomènes par un lieu bien fragile. Cette conception a duré très longtemps et il n’est pas certain qu’elle ne dure pas encore aujourd’hui et qu’elle ne contribue pas à jeter une sorte de défaveur sur ce groupe de maladies. Encore en 1859, des sociétés médicales, comme la Société médico-psychologique, proposaient l’étude « des névroses extraordinaires », comme s’il était raisonnable d’employer ce mot pour l’examen de phénomènes naturels.


2. – Les névroses, maladies sans lésions.


Le traité des maladies nerveuses de Sandras, publié en 1851, ne semble pas réaliser un progrès sensible