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cependant, je crois que ce point de sens commun se trompe. L’opération la plus difficile, celle qui disparaît le plus vite et le plus souvent, dans toutes les dépressions, est celle dont on vient justement de reconnaître l’importance, l’appréhension de la réalité sous toutes ses formes. Elle contient l’action qui nous permet d’agir sur les objets extérieurs, l’action surtout difficile, quand elle est sociale, quand elle doit s’exercer, non seulement sur le milieu physique, mais encore sur le milieu social dans lequel nous sommes plongés, l’action difficile aussi quand elle doit avoir, à nos yeux, les caractères de liberté, de personnalité qui montrent la complète adaptation de l’acte non seulement avec le milieu extérieur, mais encore avec la plupart de nos tendances antérieures nettement coordonnées. Ce premier groupe des opérations les plus élevées et les plus difficiles contient aussi l’attention qui nous permet de percevoir les choses avec la certitude de leur existence. Saisir une perception ou une idée avec le sentiment que c’est bien le réel, c’est-à-dire coordonner autour de cette perception toutes nos tendances, toutes nos activités, c’est l’œuvre capitale de l’attention. En outre, savoir jouir complètement du présent, de ce qu’il y a de beau et de bon dans le présent et aussi savoir souffrir du présent quand il y a lieu sont des opérations mentales qui semblent très difficiles et dignes d’être rapprochées de l’action et de l’attention au réel.

Au-dessous de ce premier degré se placent les mêmes opérations simplement dépouillées de ce qui faisait leur perfection, c’est-à-dire de l’acuité du sentiment du réel, ce sont des actions sans adaptation exacte aux faits nouveaux, sans coordination de toutes les tendances de l’individu, des perceptions vagues sans certitude et sans jouissance du présent : c’est ce que j’ai souvent désigné sou le nom d’actions et