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accidents. C’est là ce qui fait le développement de l’idée fixe somnambulique, c’est là ce qui détermine l’aspect de la somnambule qui a les yeux ouverts et qui ne voit pas, ou plutôt qui voit certains objets en rapport avec son idée et non les autres. C’est là ce qui détermine, par des lois que je ne puis étudier ici, l’amnésie consécutive aux idées fixes de forme somnambulique. On retrouve ce même caractère dans le bavardage exagéré qui se développe isolément sans être arrêté par aucune autre fonction. On le retrouve aussi dans le mutisme de l’hystérique incapable de ramener dans sa conscience personnelle la fonction du langage émancipée. C’est un caractère commun des agitations motrices, des phénomènes subconscients, des paralysies et des anesthésies. L’anesthésie[1] se comporte comme une distraction bizarre, elle est variable, mobile, elle disparaît souvent quand on peut provoquer un effort d’attention du sujet; elle n’est ni profonde, ni complète, car elle laisse subsister des sensations élémentaires sous forme de phénomènes subconscients faciles à constater dans bien des cas. On peut produire par la distraction elle-même des insensibilités qui ont tous les caractères des anesthésies hystériques. Quand la répartition de l’anesthésie se modifie, on constate des alternances, des équivalences dans les sensations disparues. « La sensibilité disait autrefois Cabanis[2], semble se comporter à la manière d’un fluide dont la quantité totale est déterminée, et qui, toutes les fois qu’il se jette en plus grande abondance dans l’un de ses canaux, diminue proportionnellement dans tous les autres .» Il faudrait revenir sur beaucoup d’anciennes études pour montrer que ce caractère joue un grand rôle dans les

  1. État mental des hystériques, 1893, I, p. 35.
  2. CABANIS, Histoire des Sensations dans l’étude des rapports physiques et du moral, oeuv. compl., 1831, III, p. 153.