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une multitude de faits plus élémentaires et ne doit son unité apparente qu’à la synthèse, à la systématisation de tous ces éléments dans une seule conscience personnelle. J’ai proposé d’appeler « champ de la conscience le nombre le plus grand de phénomènes simples ou relativement simples qui peuvent être réunis à chaque moment, qui peuvent être simultanément rattachés à notre personnalité dans une même perception personnelle »[1]. Ce champ de conscience ainsi entendu est fort variable suivant les divers individus et suivant les diverses circonstance de la vie. On peut décrire sous le nom du rétrécissement du champ de la conscience une certaine faiblesse morale consistant dans la réduction du nombre des phénomènes psychologiques qui peuvent être simultanément réunis dans une même conscience personnelle.

Ce caractère psychologique ainsi entendu, ce rétrécissement du champ de la conscience se retrouve dans tous les stigmates dont nous venons de parler. Il n’est que le résumé de la suggestivité et de la distractivité. On pourrait facilement montrer qu’il se retrouve toujours dans ce qu’on appelle vaguement le caractère des hystériques. Leurs enthousiasmes passagers, leurs désespoirs exagérés et si vite consolés, leurs convictions irraisonnées, leurs impulsions, leurs caprices, en un mot ce caractère excessif et instable, nous semblent dépendre de ce fait fondamental qu’elles se donnent toujours tout entières à l’idée présente sans aucune de ces nuances, de ces réserves, de ces restrictions mentales, qui donnent à la pensée sa modération, son équilibre et ses transitions.

Mais je crois que l’on peut aller beaucoup plus loin et que l’on peut retrouver ce trouble de la personnalité, cette étroitesse de la conscience personnelle comme un caractère essentiel de la plupart de leurs

  1. Autonomie psychologique, 1889, p. 194.