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pas l’idée fixe de ces détails. Un sujet se blesse à la main droite, il a ensuite une hémiplégie droite, mais en même temps il a du mutisme : connaissait-il donc l’association si fréquente, même dans l’hystérie, des troubles de la paroles et des troubles respiratoires avec l’hémiplégie droite? Comment se fait-il qu’après des traumatismes oculaires ou simplement des émotions portant sur les yeux, il y ait des paralysies distinctes de la vision binoculaire ou de la vision monoculaire avec leurs lois si singulières, des troubles curieux de l’accommodation, des rétrécissements du champ visuel, et même des hémianopsies, car il s’en rencontre? Tous ces phénomènes et bien d’autres auront donc toujours été enseignés au malade par le médecin qui l’a examiné avant nous. Cette supposition est enfantine et, dans bien des cas, tout à fait impossible. Ce qui est vrai, c’est que presque toujours les symptômes maladifs dépassent de beaucoup les idées que le sujets peut avoir, quelle que soit l’origine qu’on leur suppose.

Cet argument se rattache à un ordre de réflexions dont l’impor-tance est encore assez faible, mais qui prendra de plus en plus de valeur avec les progrès de la psychologie pathologique. Les accidents névropathiques, les accidents hystériques en particulier ne sont pas du tout, comme on le croit naïvement, livrés au hasard des idées, des inspirations du sujet ou des bavardages de son médecin. Ils ont, comme le pensait Charcot, un déterminisme très rigoureux, ils sont soumis aux mêmes conditions dans tous les temps et dans tous les pays; ils sont déterminés par des lois physiologiques et psychologiques que les sujets ignorent et que nous ignorons aussi. Nous découvrons péniblement avec beaucoup de tâtonnements et d’erreurs quelques-unes de ces lois qui s’appliquent depuis des siècles, à l’insu de tout le monde, des malades et de leurs médecins.