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avons remarqué, plus nettement qu’à propos des phénomènes précédents, la véritable nature de ces amnésies, de ces paralysies, en un mot, de ces disparitions de fonctions; la fonction est loin d’être détruite, elle continue d’exister et se développe même souvent d’une manière exagérée; elle n’est supprimée qu’à un point de vue très spécial, elle n’est plus à la disposition de la volonté ni de la conscience du sujet.

Quoique ce soit surprenant, nous avons constaté les mêmes faits même dans l’étude des fonctions viscérales. Les refus d’aliments, les vomissements, les dyspnées hystériques ne sont pas des maladies de l’estomac ou du poumon. Elles consistent dans un sorte d’émancipa-tion de la fonction cérébrale et psychologique relative à ces organes : il y a tantôt exagération indépendante de la fonction, tantôt plus souvent disparition de la conscience des besoins organiques et des actes qui s’y rattachent.

Enfin, dans nos dernière études, nous avons cherché dans le caractère même de ces malades, dans la manière d’être de leur esprit, des stigmates fondamentaux qui permettent de reconnaître et de comprendre la maladie. Nous sommes arrivés à mettre en évidence des stigmates propres à l’hystérie : la suggestivité, la distractivité et une certaine mobilité bizarre des phénomènes qui se remplacent facilement les uns les autres d’une manière en apparence équivalente.

C’est là un tableau clinique qui doit nous suffire en pratique : en nous souvenant de ces faits principaux, en leur comparant les cas complexes et moins nets que la pratique nous présente, nous arriverons déjà à apprécier assez justement la maladie hystérique, à éviter bien des préjugés et bien des erreurs qui sont encore aujourd’hui très communs. Malheureusement, l’esprit humain ne se contente pas à si bon marché, il aime les dangers et les querelles, et nous