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souvent le premier signe du trouble mental chez ces jeunes filles de bonne volonté qui ne peuvent jamais faire qu’une commission à la fois. Dans certains cas et chez quelques sujets, on peut même mettre en évidence ce caractère d’une manière expérimentale.

C’est d’ailleurs ce caractère qui donnait une apparence spéciale à tous leurs accidents : À côté du phénomène positif, développement de l’idée somnambulique, convulsions, émotions persistantes, il y avait une sorte de lacune, oubli complet de la situation actuelle, indifférence au ridicule, insensibilité à la fatigue que nous n’aurions pas eu à la place. On dirait que ces sujets une fois malades oublient tout ce qui est en dehors de leur accident actuel : elles ne se souviennent pas d’avoir été jamais autrement, elles n’imaginent pas qu’on puisse être autrement, de là cette résignation et cette absence d’effort qui nous surprenaient.

L’exagération de cette disposition va amener ce qu’on appelle les subconsciences : une foule de choses vont exister en dehors de la conscience personnelle. On pourra faire marcher et agir ces malades à leur insu, si les idées qu’on exprime n’ont pas attiré leur attention et si elles restent dans ce domaine de la distraction. Ce caractère va amener la médiumnité comme tout à l’heure le développement des idées amenait les grands somnambulismes.

Peut-on dire que ce phénomène soit identique à la distraction de l’homme normal attentif à quelque étude, distraction que nous avons prise comme point de départ pour faire comprendre par comparaison le caractère de nos malades? Je ne le crois pas : chez l’homme normal, la distraction n’est jamais aussi complète, les phénomènes méprisés sont en dehors du foyer de l’attention, mais ils ne sont pas complètement en dehors de la conscience, et ils se rappellent à nous