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d’idées très simples que la volonté n’arrête pas tout de suite. Il y a évidemment des individus un peu naïfs, distraits, peu habitués à surveiller et à critiquer leurs idées chez qui de pareil accidents doivent être plus fréquents que chez d’autres. Je crois cependant qu’il ne faut pas se laisser aller à une illusion : des personnes dociles, obéissantes, disposées à penser que d’autres ont plus d’intelligence et d’expérience qu’elles-mêmes et qui, à cause de cela, croient facilement ce qu’on leur enseigne, des personnes faibles désirant éviter des luttes pénibles et préférant obéir rapidement sur des points qu’elles jugent d’ailleurs insignifiants, tous ces individus ne sont pas du tout des individus suggestibles. Leur adhésion est facile, soit parce qu’ils ont confiance, soit parce qu’ils préfèrent l’obéissance à la lutte, mais c’est toujours une adhésion, une acceptation de l’idée par la personnalité et ce n’est pas un développement indépendant de l’idée, lequel n’arrive en réalité qu’assez rarement.

Des phénomènes identiques à la suggestion s’observent plus souvent chez l’homme normal lorsqu’il est momentanément transformé par quelque puissante influence : M. Le Bon faisait justement remarquer que l’individu mêlé à une grande foule et impressionné par elle devient momentanément suggestible. Beaucoup de grandes émotions, la peur, la surprise, l’intimidation, ont des effets semblables et certaines suggestions observées chez des individus à peu près normaux sont dues à un troubles momentané de la conscience déterminé par certaines émotions. Il y a des individus qui savent très bien user de cette influence de l’émotion dépressive et qui savent se servir de cette suggestivité momentanée qu’elle détermine.

Cependant, chez l’individu normal, ces transformations ne sont pas fréquentes et elles ne doivent pas