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actes complets. De même il y une grande différence entre nos idées des objets et nos perceptions des mêmes objets et les premières ne se transforment pas aisément de manière à se confondre avec les secondes. Les idées par elles-mêmes peuvent s’accompagner d’ébauches de sentiments viscéraux mais n’aboutissent pas toutes régulièrement à ces réactions viscérales que nous venons de voir. Sur ce point la suggestion diffère nettement de la majorité de nos idées.

Cependant la transformation des idées en actes et même la transformation des idées, sinon en perceptions du moins en croyances, s’opère quelquefois. Dans un premier cas l’idée se transforme graduellement parce qu’elle se trouve d’accord avec des instincts puissants des tendances fortement constituées en nous depuis longtemps qui viennent ajouter leur force à celle de l’idée abstraite et lui permettre de se compléter. C’est ainsi que l’idée d’une chance de fortune, l’idée d’un appel de sa belle pourront faire marcher et courir l’homme cupide et l’amoureux, et pourront les faire croire facilement à l’existence d’un fait qu’ils désirent mais qui n’est pas réel. Dans d’autres cas ce développement se fera en nous d’une manière plus compliquée. Un romancier, un peintre développent aussi leurs idées, mais c’est en cherchant péniblement tous les éléments qui peuvent s’y joindre pour les rendre aussi réelles et aussi vivantes que possible. Quand nous cherchons à accomplir un travail en rapport avec une idée, nous ajoutons aussi à l’idée des sentiments et même des actes. Cela est très vrai, mais c’est que dans ces cas beaucoup d’autres phénomènes de notre esprit, des souvenirs, des imaginations, des tendances se sont coalisés avec l’idée primitive. Toute notre personnalité avec tout son passé et toutes ses tendances acquises s’est portée au secours de l’idée, c’est ainsi qu’elle l’a adopté et l’a