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Cherchons donc à dégager ce qu’il y a de caractéristique dans ces observations : il est facile de remarquer l’analogie évidente qu’il y a entre ces phénomènes appelés fugues et les idées fixes à forme somnambulique que nous avons étudiées précédemment. D’une manière générale les grands caractères essentiels sont les mêmes, et nous pourrions sans difficulté appliquer ici les quatre lois constatées précédemment : 1º Pendant l’état anormal, il y a une certaine idée, un certain système de pensées qui se développe d’une manière exagérée : il est clair que P…, par exemple, pense tout le temps, pendant les huit jours de sa fugue, à l’accusation portée contre lui par son frère, aux conséquences qu’elle peut avoir, aux moyens d’échapper à une arrestation imminente. Il est clair que Rou… médite pendant les trois mois de sa fugue sur les moyens d’atteindre la mer Méditerranée, sur l’espoir d’y rencontrer un bateau et de partir pour l’Afrique. Ces méditations sont disproportionnées, ne sont pas en rapport avec la situation d’un employé de chemin de fer, père de famille et d’un petit commis d’épicerie. Elles déterminent des actes, elles augmentent la force de résistance de ces gens qui courent, qui travaillent, qui supportent des privations sans difficulté. 2º Pendant l’état anormal, les autres pensées relatives à l’existence antérieure, à la famille, à la situation sociale, à personnalité paraissent supprimées. Cela semble très bien confirmé par le phénomène du réveil : lorsqu’une circonstance fortuite ramène dans leur esprit la pensée de leur famille, de leur nom véritable, de leur personnalité antérieure, ils retombent dans un autre système d’idées et se réveillent. Cela prouve bien que, pendant l’état anormal, cette catégorie de souvenir n’avait pas été réveillée suffisamment.

En dehors de l’attaque, ou de l’état anormal, pendant la période considérée comme normale (nous devinons