Cette première forme du phénomène nous permet de mieux comprendre d’autres accidents du même genre. À côté de l’écriture automatique il y a la parole automatique. On connaît l’histoire des petits prophètes cévénols pendant la révolte des Camisards : ils parlaient involontairement en croyant obéir à une impulsion étrangère : « ils écoutaient, dit un témoin, leurs propres paroles comme provenant de l’Esprit. Ils avaient le sentiment que leurs idées leur étaient fournies à mesure que les mots leur étaient dictés, que leur langue était mise en mouvement sans qu’ils y fussent pour rien ». Au XVIIIe siècle, Carré de Montgeron décrivant les convulsionnaires du cloître Saint-Médard racontait le fait suivant : « Il arrive souvent que la bouche des orateurs prononce une suite de paroles indépendantes de leur volonté en sorte qu’ils s’écoutent eux-mêmes comme les assistants et qu’ils n’ont connaissance de ce qu’ils disent qu’à mesure qu’ils le prononcent ». Beaucoup de nos malades présentent aujourd’hui des phénomènes du même genre et quand nous parlerons du mutisme nous verrons plusieurs sujets qui ne peuvent plus parler volontairement, mais qui sont tout étonnés d’entendre leur bouche prononcer des paroles qu’ils n’ont ni voulues, ci conçues.
D’autres actes que la parole peuvent être ainsi en rapport avec ce délire partiel qui semble se développer au-dessous de la conscience normale et qui mérite d’être appelé subconscient. Je rappelle seulement un fait amusant que j’ai décrit autrefois[1]: une femme de vingt ans, B… qui avait déjà présenté toutes sortes d’accidents névropathiques venait se plaindre de ce qu’elle appelait des vertiges. Quand elle marchait dans la rue, le sol se dérobait tout à coup sous ses pieds, elle se sentait précipitée en avant et devait se
- ↑ Presse médicale, 1er juin 1895. Névrose et idées fixes, 1898, I, p. 219.