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il éprouva une violente douleur à la tête, il sentit comme un choc à la partie postérieure de la tête. Le coup à l’occiput est très souvent caractéristique des grandes attaques, des grands changements de personnalité. C’est justement ce qui est arrivé ici, immédiatement après ce coup, quelque chose a dû changer dans l’état mental de notre homme, car il ne se souvient plus du tout des événements qui sont survenus ensuite ce dimanche 3 février 1895, ni les jours suivants.

Quand il reprit conscience, ou plutôt quand il reprit le fil de ses souvenir, la situation avait changé d’une manière extravagante. Il était couché dans un champ plein de neige à demi-mort, et, en tous les cas, stupéfait de se retrouver là. Il se releva péniblement, trouva une route avec des rails de tramway, les suivit et finit par arriver non sans peine dans une ville absolument inconnue, auprès d’une gare de chemin de fer. C’était la gare du Midi à Bruxelles. Il était onze heures du soir et la date qu’il lut sur un journal était le 12 février. En somme il sentit un coup sur la tête à Nancy, le 3 février et il se réveilla dans un champ aux environs de Bruxelles, le 12 février. La façon dont il avait accompli ce singulier voyage, tout ce qui s’était passé dans l’intervalle, lui était absolument inconnu.

Il télégraphia pour demander des secours, on s’occupa de lui, on le soigna, on le ramena à Paris à la Salpêtrière où nous l’avons étudié et nous sommes parvenus à lui faire retrouver le souvenir de qui s’était passé pendant ces neufs jours. Aussi pouvons-nous compléter maintenant l’histoire de sa fugue.

Sur le pont Stanislas, à la suite de la sensation de choc sur la tête, il se sentit l’esprit envahi par une terreur énorme, à la pensée des accusations que son frère portait contre lui. Il rentra chez lui extrêmement inquiet, quelques petits incidents augmentèrent