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modifications profondes de la sensibilité, les changements de la vision et de l’audition que nous avions observés chez les hystériques; mais, après les remarques précédentes, il est facile. Ici, comme dans le cas précédent, nous ne voyons pas de véritables modifications des organes sensoriels. Les algies se développent sur des organes qui sont sains et dans lesquels rien n’explique ni la douleur ni les sentiments étranges du sujet. Cela est bien remarquable chez les photophobiques en particulier qui n’osent pas ouvrir les yeux, qui se résignent à la cécité, quand leur œil est absolument bien portant, quand l’oculiste ne peut pas y découvrir la plus légère altération. Bien mieux le sens même de la douleur n’est pas exagéré chez les malades qui poussent des hurlements dès qu’on frôle leur peau. J’ai souvent essayé de mesurer la sensibilité à la douleur avec des appareils de précision chez ces malades qui semblent sentir si fortement; il faut pour cela commencer par les rassurer, arrêter un peu leurs ruminations et leurs obsessions, les intéresser à ce petit problème, leur apprendre à dire exactement à quel moment le contact de l’aiguille devient une piqûre douloureuse. On est tout surpris de constater qu’ils arrêtent l’instrument au même degré que l’homme normal et que par conséquent ils ont conservé la même sensibilité douloureuse, ni moindre ni plus grande. Il n’y a là que des sentiments pathologiques à propos de l’appréciation des perceptions et des agitations qui s’y surajoutent.

Les principaux sentiments observés sont, comme on l’a vu, le sentiment d’absence de relief, d’obscurité, de lointain, d’étrange, de jamais vu, de faux, de rêve, d’éloignement, d’isolement, de mort. Quel est le sentiment auquel se rattachent tous les autres? On a souvent dit que c’était le sentiment de nouveau et d’