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vision latérale ou indirecte qui nous permet de voir moins distinctement des objets situés latéralement et en dehors du point de fixation. Chez les hystériques, ces deux fonctions visuelles semblent se dissocier : la première subsiste seule et la seconde disparaît en partie ou complètement. Le sujet ne voit plus que les objets situés au point de fixation et ne perçoit plus consciemment les objets situés latéralement. C’est ce que l’on exprime en disant que le champ visuel de l’hystérique est rétréci concentriquement. Ce symptôme de l’hystérie a été récemment mis en doute; sans discuter ici ni son origine, ni son mécanisme, j’insiste seulement sur sa réalité. J’ai recueilli 78 belles observations de rétrécissement du champ visuel dans les conditions les plus diverses et je considère que cet accident, sans être aussi fréquent peut-être qu’on le croyait autrefois, conserve une grande importance.

Je ne puis que signaler ici un curieux problème à l’étude duquel j’ai pris un intérêt particulier. Le champ visuel des hystériques ne peut-il être modifié que de la manière précédente? Le rétrécissement est-il toujours concentrique, ne peut-il pas être déformé par des scotomes irréguliers et, en particulier, peut-on rencontrer, dans l’hystérie, le champ visuel hémiopique ou le phénomène de l’hémianopsie? La question est plus grave qu’elle ne semble être : l’hémianopsie, c’est-à-dire la vision dans une seule moitié du champ visuel, est un phénomène fréquent à la suite des lésions cérébrales; son existence dans l’hystérie aurait des conséquences graves au point de vue du diagnostic et de l’interprétation de la maladie. Après des oscillations, les neurologistes étaient arrivés, surtout après l’ouvrage de Gilles de la Tourette, à nier complètement l’existence de l’hémianopsie hystérique et à soutenir que ce symptôme ne pouvait être produit que par une lésion organique destructive d’un centre déterminé. Cette décision ne