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J’ai publié, il y a déjà longtemps, une étude sur l’interprétation de ce phénomène de l’allochirie que je considérais comme un trouble exclusivement psychologique[1]. Mon interprétation est restée longtemps ignorée et ce n’est que tout récemment que M. E. Jones l’a reprise en la développant par de nouvelles observations[2]. La localisation des sensations dépend du sentiment de certains caractères propres à chaque région du corps qui accompagne chaque sensation : ces caractères sont les signes locaux que décrivait déjà Wundt. Ces signes locaux varient suivant les différentes régions; mais ils sont fort semblables entre eux, quand il s’agit de deux points symétriques du corps, comme les deux poignets ou les deux pieds. En un mot, il est plus facile de distinguer les signes locaux de la main et ceux du genou que de distinguer les signes locaux de la main droite de ceux de la main gauche. Cette perte de la localisation et en particulier ce trouble spécial de l’allochirie dépendent d’une insensibilité systématique portant précisément sur cette différence minime des signes locaux.

On peut encore signaler une autre forme d’anesthésie plus générale qu’on appelle généralement l’anesthésie organique : elle enlève non seulement la connaissance des impressions venant de l’extérieur, mais la conscience même de l’existence du membre. Ces personnes, anesthésiques d’un côté, se sentent dans le vide si elles sont couchées sur ce côté. Une malade ayant une anesthésie de ce genre à la jambe, prétendant sentir ses orteils collés à sa cuisse, comme si le genou et la jambe avaient disparu.

On a aussi distingué les anesthésies d’après les régions sur lesquelles elles s’étendaient. Il est en effet intéressant de remarquer que, dans certains cas,

  1. Névroses et idées fixes, I, p. 234.
  2. Communication au Congrès de neurologie d’Amsterdam¸ 1906.