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Le sujet se plaint rarement de ne pas sentir, c’est un symptôme auquel il est d’ordinaire indifférent, à moins qu’il n’y ait en même temps de ces chatouillements, de ces troubles qui accompagnent quelquefois des anesthésies incomplètes. C’est un symptôme que le médecin découvre à propos d’autres phénomènes. En faisant l’examen du sujet, on remarque qu’il y a certaines excitations auxquelles l’individu normal réagit et qui laissent absolument indifférent le malade. Cette insensibilité est, en effet, rarement totale, presque toujours elle est plus ou moins systématique, c’est-à-dire qu’elle porte exclusivement sur telle ou telle catégorie de phénomènes. Nous observerons le plus communément l’anesthésie à la douleur, l’analgésie, tandis que le sujet continue à sentir les impressions de toucher ou les changements de température, il ne réagit pas aux excitations qui, d’ordinaire, provoquent de la douleur. Quelquefois, cette analgésie est considérable et de très forte excitations ne sont pas senties : j’ai décrit une femme à qui on a pu pratiquer l’opération assez grave du curettage de l’utérus sans chloroforme et qui ne manifesta aucune sensibilité[1]. Le plus souvent cette analgésie n’est pas absolue; lorsque l’excitation est très forte et surtout lorsqu’elle est bizarre, anormale, elle réveille la sensation. Certains auteurs se trompent, à mon avis, en déclarant qu’un sujet n’avait pas d’analgésie, parce qu’ils réveillent momentanément sa sensibilité par de fortes excitations électriques. C’est un caractère des anesthésies hystériques, comme nous le verrons, que de pouvoir être dissipées par des excitations anormales. Cela n’empêche pas qu’avant ces excitations et en dehors d’elles, le sujet n’ait eu une indifférence spéciale pour des traumatismes qui éveillent la douleur dans la conscience des autres hommes.

  1. Névroses et idées fixes, I, p. 481.