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savent, moins que tout autre, la supporter et lui donnent vite une importance démesurée.

Il y a d’abord, dans l’hystérie, des douleurs que l’on peut appeler des douleurs vraies, car elles ont pour point de départ une altération réelle de l’organisme qui, chez tout homme, provoquerait une sensation pénible. Ces malades semblent concentrer toute leur attention, toute leur conscience sur cette douleur et lui donnent des proportions qui nous paraissent très exagérées. Il est difficile de savoir si réellement la conscience de la douleur elle-même est, chez eux, beaucoup plus grande qu’elle ne serait chez nous, dans les mêmes circonstances. Il y a surtout exagération des manifestations extérieures de la douleur, des cris, des contorsions, et, en même temps, des sentiments de peur, de désespoir qui se développent à propos de cette douleur. Une de ces malades hurlait désespérément à propos d’une légère piqûre à un doigt : je lui demandai de chercher avec calme si réellement elle souffrait beaucoup. Elle parut interloquée : « C’est vrai, dit-elle après réflexion, je ne sens pas grand’chose; mais mon sang coule, donc, je dois souffrir beaucoup », et elle se remit à hurler. L’émotion se développe à propos d’un léger trouble et donne souvent au sujet l’illusion de la douleur plutôt que la douleur même.

Or, il y a, dans l‘hystérie même, des conditions qui, en outre des accidents ordinaires, peuvent servir de point de départ à ces impressions douloureuses si exagérées, ce sont les contractures, les spasmes dont nous venons de parler. Les contractures sont très souvent douloureuses et nous pouvons le comprendre en songeant à la douleur d’une contraction musculaire prolongée jusqu’à la fatigue excessive. Ces douleurs sont surtout manifestes quand la contracture commence et quand elle se défait; nous connaissons, par expérience, la douleur d’une crampe du mollet au