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désignés par des noms particuliers, comme autant de maladies distinctes : on avait ainsi l’astraphobie, la lyssophobie, la misophobie, la rupophobie, l’aicmo-phobie, etc… Sauf la bizarrerie du nom, ces désignations n’ont plus aujourd’hui aucun intérêt.

Le plus souvent ces phobies du contact se compliquent d’une foule de pensées obsédantes et impulsives. Celle-ci a peur de commettre un homicide ou un suicide si elle touche à un objet pointu et prend en horreur également les fleurs rouges et les cravates rouges qui lui rappellent l’homicide ou même tous les sièges sur lesquels ont pu s’asseoir des individus porteurs de cravates rouges. Celle-là ne peut plus toucher un verre, parce que les verres peuvent contenir des purgatifs et que cela pourrait lui donner la pensée de se faire avorter si elle était enceinte et si elle s’était laissée séduire.

À côté de ces phobies des objets se placent des phobies un peu plus compliquées que j’ai appelées des phobies des situations. Elles portent non plus sur un objet, mais sur un ensemble de faits et d’impressions du sujet. Le type de ces symptômes est l’agoraphobie, décrite par Westphal en 1872, puis par Legrand du Saulle en 1877. « La peur des espaces, dit ce dernier auteur, est un état névropathique très particulier, caractérisé par une angoisse, une impression vive et même une véritable terreur, se produisant subitement en présence d’un espace donné. C’est une émotion comme en présence d’un danger, d’un vide, d’un précipice, etc… Un malade commence par avoir des coliques dans la rue… La pensée d’être abandonné dans ce vide le glace d’effroi et la conviction d’une assistance, quelle qu’elle soit, l’apaise sans effort. Point de peur sans le vide, point de calme sans l’apparence d’un semblant de